Vers 1120, deux moines bénédictins, Robert et Ricuin quittent l'abbaye Saint Vanne de Verdun pour s'installer sur un terrain donné par des châtelains de Vienne-le-Château, dans un lieu désert, La Chalade, au cœur de la forêt d'Argonne. Sur ordre de l'évêque, Ricuin se rend quelque temps plus tard à l'abbaye des Trois-Fontaines (Haute-Marne), fondée depuis peu par les cisterciens de Clairvaux (Aube) et obtient l'envoi de religieux. La construction d'une église de style roman est entreprise dès 1127. Elle est consacrée en 1136. L'abbaye s'enrichit au fil des ans de dons et legs.

 

Une nouvelle église est bâtie entre 1320 et 1340 dans le style gothique en utilisant un matériau du pays, la gaize, un grès jaune et gélif, qui constitue le sous-sol de toute l'Argonne. Les religieux entretiennent des verreries, des forges et des tuileries et mettent en valeur la Biesme, un affluent de l'Aisne.

 

L'institution de la "commende" en 1592 marque le début du déclin. Les abbés nommés par le roi et non plus par l'Eglise sont plus enclins à percevoir les bénéfices attachés au titre qu'à assumer les devoirs de leur charge et à assurer le bon entretien des bâtiments.

 

Au cours des siècles, l'abbaye connut son lot de guerres, de pillages et d'épidémies. Elle fut même abandonnée de 1650 à 1657. L'église perdit alors plusieurs travées. La longueur de sa nef haute de 14,50 mètres, passa de 49,80 mètres à 32,20 mètres.

 

A la veille de la Révolution, il ne restait plus qu'une dizaine de religieux qui avaient loué les bâtiments inoccupés à un gentilhomme verrier, Monsieur de Bigault de Parfonrut. Celui-ci se porta acquéreur du monastère à la vente des biens nationaux en 1790, le préservant de la démolition.

 

Laissée sans entretien, l'église commençait à tomber en ruines au début du XIXème siècle lorsque son nouveau curé, l'abbé Chaput, qui desservit l'église de 1851 à 1881, entreprit sa restauration. Les difficultés financières et un contentieux avec la commune le poussèrent à renoncer à reconstruire le clocher. L'abbatiale fut classée monument historique en 1862.

 

Si l'abbaye transformée en poste de  premier secours fut relativement épargnée en 1914-1918, alors que le village était détruit, elle subit de gros dégâts lorsqu'un chapelet de bombes tomba par erreur sur le cimetière attenant en 1940.

 

Le chœur pentagonal, inondé de lumière par de hautes fenêtres géminées, est flanqué de part et d'autre de chapelles qui forment les bras du transept. La décoration est sobre. Plusieurs vitraux sont des grisailles datant du début du XIVème siècle, le seul cas de grisaille cistercienne en Lorraine (la grisaille est une technique de peinture sur verre, vitrifiable, plus ou moins transparente, de ton gris-brun, obtenue par mélange d'oxyde de fer et de cuivre auquel on ajoute un fondant ; elle est étendue au pinceau et autorise un travail de modelé en demi-teinte qui peut être accentué par des enlevés ou grattage de la grisaille séchée avec des pointes de bois). La grande rosace du XVème siècle (7 mètres de diamètre) provient de l'abbaye Saint Vanne de Verdun. Trois dalles funéraires du XIIIème siècle rappellent que des chevaliers furent inhumés dans cette église.

 

L'église est aujourd'hui située sur le chemin de Compostelle au départ des Ardennes belges et sur un circuit de randonnée d'une dizaine de kilomètres, inauguré le 15 juillet 2017, qui relie tous les sites remarquables de la commune (cf. ci-dessous).